Archives du vendredi
Chaque vendredi est publiée sur Facebook une archive sur l’histoire de la ville de Vierzon. Jean Foucrier, coup de feu rue des Changes, les fils d'Adrien Thouvenin, la ferme de Dournon... retrouvez ici toute l'histoire de notre ville.
On a pris l'habitude de dire que la ville de Vierzon est aussi étendue que Paris intramuros. De périf Est à périf Ouest, il faut 10 kilomètres pour traverser la capitale ; autant pour traverser Vierzon, du Coq gaulois au Village Aubry.
Dans une ville aussi étendue, les distances deviennent problématiques entre les sites de production et les lieux de l'habitat ouvrier.
Dans notre ville, les transports en commun voient le jour au tournant du 20e siècle avec le « Tacot », ce petit chemin de fer départemental d'abord destiné au transport de marchandises vers les cantons qui ne possédaient pas de gare du Paris-Orléans.
La Compagnie des tramways de l'Indre gérait depuis 1903 la ligne Vierzon – Vatan – Issoudun. Le bureau terminus était face à la gare, entre l'hôtel de Bordeaux et le hall de la Société Française.
Dans les années 1910, l'automobile s'installe en France, deuxième pays producteur. De nouveaux véhicules voient également le jour : le camion et le car, boostés par la Première Guerre Mondiale, dont les demandes vers ce type de véhicules vont croissant. C'est même la multiplication des camions et des cars sur les routes de l'entre-deux guerres qui sonnera la glas du tacot.
En attendant, à Vierzon, tous les moyens sont bons pour raccourcir les distances, grâce au vélo, tout d'abord. Mais c'est un moyen de locomotion encore onéreux au sortir de 1918. Toutes les familles ne peuvent pas se le permettre.
Quant au tacot, il relie les quartiers de Bourgneuf à la gare par la rue des ponts et la rue de la République. Mais les autres quartiers (communes) ne sont pas desservis, notamment les Forges.
Il existera bien un deuxième tronçon de Vierzon Villages (place du tacot) à Neuilly-en-Sancerre par les Forges mais la ligne arrivera tardivement (1923) et le tracé ne sera même pas totalement achevé dans les campagnes.
C'est la municipalité de Maurice Nivet à Vierzon Forges qui va être à l'origine de la première ligne d'autobus public. Il s'agit de relier la gare à Vierzon Forges, 8 fois par jour. Le service est concédé à Vallin, garagiste à Vierzon Vierzon Ville (concessionnaire Citroën), à partir du 15 juin 1926.
Les arrêts sont alors : les Bourbiers, Village Aubry, en face de chez Moreau (?), les grands moulins, le petit Paris, la gare. Pour la totalité du trajet, comptez 20 minutes et 1,25franc, soit 25 centimes d'un arrêt à l'autre.
C'est tout de suite le succès mais il y a un hic. Vallin ne possédant pas d'autobus, il en a acheté un. Il coûte cher en prix de revient et la municipalité pense à acheter son propre autobus. Des subventions sont recherchées auprès de la municipalité de Vierzon Ville mais aussi des industriels qui pourraient mettre la main au porte-monnaie.
En 1928, Maurice Nivet a pris des renseignements auprès de la commune de Colombelle, dans le Calvados. Cette dernière exploite le service d' »autobus en régis municipale et en est fort satisfaite. C'est dans cette direction que souhaite se diriger la commune de Vierzon Forges. Le maire signale également que, vu le succès du service, il ne faut absolument pas qu'il soit interrompu. Cela implique qu'il faut qu'il y ait un autobus de secours dans le garage municipal.
Dans sa séance d'octobre 1928, le conseil municipal acte la création de la régie municipale de l'autobus et son budget. Le conseil acte également l'achat d'un autobus neuf. Enfin il sera demandé combien Vallin consentirait à revendre son autobus à la ville, autobus qui servirait d'autobus de secours.
C'est ainsi qu'en mars 1929 la municipalité de Vierzon Forges se voit propriétaire de deux autobus : le vieux Latil de Vallin mais aussi un Saurer tout neuf qui assurera le service.
Jusqu'à la réunification de 1937, le service en restera là. Il n'y aura jamais qu'une seule ligne, les Forges – la gare.
Lorsque Georges Rousseau est élu maire du Grand Vierzon, des discussions ont eu lieu au sein du conseil pour élargir le réseau. Un deuxième autobus – d'occasion – avait même été acheté. Mais la guerre a enterré ce projet comme tant d'autres.
L'élargissement du réseau se fera en 1947, sous le municipal Maurice Caron. Une deuxième ligne est créée, Bourgneuf – Saint Martin. Et quatre cars assurent le service quotidien.
Après 1959, le service de car évoluera en fonction de l'avancée des travaux dans les quartiers nouvellement urbanisés (Colombier, Sellier, Clos du Roy, Chaillot...)
Le service actuel avec ses trois lignes est arrivé après mai 1968, remanié en 1979.
Ligne 1 (noire) : ZI les Forges – Giraudière
Ligne 2 (verte) : Chaillot – Sellier – Rond Point Coop
Ligne 3 (rouge) : Les Bruyères – Rond Point Coop
Ligne 4 (bleue) : Croix moreau – Bois d'Yèvre – Forges ZI (par intermittence)
En 1984 et pour se mettre en conformité avec la loi, le service doit être concédé. Des entreprises sont contactées. C'est la CGE Automobiles qui est choisie.
Et dorénavant le réseau s'appellera TUV, Transports Urbains Vierzonnais.
Puis Bus Vallée...
Enfin le VIB'...
Images : Archives municipales Vierzon
Depuis les Guerres Puniques, 166 av JC, Carthage est soumise à l’autorité romaine et devient une province de l’Empire, la province d’Afrique.
L’Empire Romain est caractérisé par une religion officiellement panthéiste. La religion du Christ se développe depuis la Palestine jusqu’en Afrique par l’Egypte, et jusqu’en Europe par la Grèce.
Il faut attendre 313 et l’empereur Constantin pour que la religion chrétienne soit autorisée.
Aux premier et deuxième siècles, les premiers chrétiens sont des chrétiens qui se terrent, pratiquant leur religion dans les caves des centres urbains. Au nom du Dieu unique ils ne reconnaissent pas la personnalité divine de l’Empereur. Les premiers chrétiens sont donc persécutés pour ne pas reconnaître la personnalité divine de l’Empereur, véritable dieu sur terre, accusés de vouloir déstabiliser l’Etat.
Carthage
A Carthage, une communauté chrétienne survit tant bien que mal. Cette province d’Afrique et sa capitale sont entrées dans le giron romain après les Guerres Puniques (166 av JC).Des autels sont érigés chez des particuliers. Ils déménagent sans cesse dans un macabre jeu du chat et de la souris.
Dans ce contexte, Perpétue est une jeune fille d’une famille de la noblesse locale. Convertie au christianisme par son confesseur Satur, elle entraîne également sa servante : Félicitée.
En 203, les chrétiens sont martyrisés dans le cirque de Carthage. Le père de Perpétue, ayant des fonctions administratives importantes ne fera rien pour sauver sa fille.
Perpétue, Félicitée, Satur, ainsi que d’autres chrétiens sont tués par le piétinement d’une vache sauvage, achevés par le glaive romain.
Reliques
Les premiers martyres chrétiens sont l’objet d’un culte. Ils montrent au restant des fidèles « le bon chemin vers le royaume de Dieu ».
Lorsque la religion d’Etat devient le christianisme, les successeurs de Saint Pierre s’installent au côté de l’Empereur, à Rome. Les papes y installent leur gouvernement. Pour perpétuer le souvenir des martyres des premiers chrétiens, les papes organisent leur canonisation et font rapatrier les reliques jusqu’à Rome.
Dans les provinces puis dans les royaumes dits barbares, la diffusion du christianisme va se faire par un courant monastique important. Là où des moines s’installent, un groupe de fidèles suit et une première communauté se crée qui grossit et essaime...
Les moines de Vierzon
A Vierzon, la christianisation a eu lieu quelque part au 7e siècle, véritable siècle de la christianisation du Berry. Selon la tradition, un premier lieu de culte chrétien a été érigé sur la butte de Sion, à l’emplacement d’un ancien lieu de culte païen.
C’est au tout début du 10e siècle que des moines bénédictins vont s’installer à Vierzon dans la durée. Ils n’arrivent pas seuls.
Lorsque Charles le Chauve avait fondé une abbaye en 843, l’archevêque de Bourges Raoul de Turenne leur avait donné des reliques de Optat et Perpétue.
Depuis ce jour, Perpétue est devenue la patronne de la communauté urbaine de Vierzon ; au fil des siècles, on lui attribue quelques « miracles ».
Dévotion
Perpétue fait alors l’objet d’une vraie dévotion.
Le reliquaire de Perpétue est conservé au sein de l’église Saint Pierre des moines de Vierzon. On le sort tous les sept mars dans une grande procession à travers toute la ville, y compris dans ses lieux les plus reculés comme Dournon. On la fait également traverser les ponts sur l’Yèvre et le Cher pour qu’elle protège des crues. Les moines y assistent, le seigneur castral également, suivis de toute la population, en cortège.
En temps que protectrice, on lui fait confiance pour atténuer les maux de la ville qui sont de quatre espèces : les épidémies, les crues, les incendies, les passages des troupes amies ou ennemies.
La Révolution Française
Les derniers moines quittent leur abbaye au printemps 1790. On transporte alors le reliquaire dans l’église Notre Dame
1792 : Par peur de l’expansion des idées révolutionnaires dans toute l’Europe, les monarchies voisines font la guerre à la France. Le pays inaugure alors la conscription. Mais il faut des armes. Les cloches des églises Notre Dames et Saint Pierre seront fondues en canons à la fonderie de La Charité.
Il faut également de l’argent pour faire la guerre. Les effets d’or et d’argent des églises seront réquisitionnés. Le curé Vaillant appellera les vierzonnais à le soutenir pour empêcher que le trésor de reliquaire ne soit rapatrié à Orléans. Des émeutes suivent, la troupe intervient et reste à Vierzon pendant un mois pour maintenir l’ordre ; mais Vaillant a gagné, après avoir un temps caché le reliquaire de Perpétue, il a de nouveau réintégré l’église Notre Dame où il se trouve toujours aujourd’hui...
De la rue Victor Hugo, il n'existe aucune image spécifique. Elle fut purement et simplement oubliée de tous les photographes et éditeurs de cartes postales du début du 20e siècle. Tous juste aperçoit-on son débouché sur la rue de la République, à quelques encablures de la Croix Blanche, lieu de fondation d'un monastère qui a donné son premier nom à la rue. Peut-être était-ce dû à la mauvaise réputation du quartier, considéré, au 19e siècle, comme mal famé.
1620 : en grande pompe l’archevêque de Bourges vient consacrer l’église saint Claude que les moines capucins viennent d’ériger dans leur nouveau monastère. En effet ils se sont installés à Vierzon en 1612, accueillis par une population vierzonnaise qui leur offre les terrains de leur couvent. C’est à la Croix Blanche (actuel square Emile Péraudin), et le seul chemin d’accès est la route de Romorantin qui passe devant.
L’enclos des Capucins est alors un vaste rectangle qui va de la route de Romorantin jusqu’à un bras de la rivière d’Yèvre, près du moulin de Grossous. L’actuel triangle que forme le square Péraudin correspond en fait au cimetière des moines et a longtemps porté le nom de « Clos Labbé » puis place des Capucins avant de s’appeler place de la République (1905), et enfin square Emile Péraudin.
Le chemin de Romorantin
Àl’époque, la rue Victor Hugo ne porte pas encore ce nom. C’est le chemin de Romorantin. Partant de la porte du Dégout (bas de la rue maréchal Joffre), c’est le seul qui permet de traverser la cité médiévale de Vierzon d’Est en Ouest, par la poterne (chemin des vignes) et la grande rue (rue Maréchal Joffre). Le trajet naturel n’est pas encore celui que nous connaissons par la rue Armand Brunet et avenue de la République. C’est ainsi que le chemin portera le nom de chemin puis rue des Capucins, faisant référence à l’établissement rencontré à la Croix Blanche (du nom d'une croix blanche matérialisant l'entrée du monastère).
L’expansion du 18e siècle
Le 18e siècle est, pour Vierzon, celui de l’expansion démographique. C’est aussi celui de l’amélioration des voies de communication à travers le royaume. Vierzon en profite et la cité va dès lors endosser son rôle de carrefour routier. En 1741 le roi classe sous le nom de route royale numéro 20 la route qui va de Paris à Toulouse. Dans la foulée, c’est la route de Nevers à Tours qui est classée sous le numéro 76. Dorénavant la route de Romorantin et Tours passera par les rues Saint Pierre (Armand Brunet) et Neuve (avenue de la République). On élargit la rue Neuve qui est la première rue extra urbaine de Vierzon, la première où des maisons se construisent à l’extérieur des anciens remparts. Le nom de « neuve » n'est pas un hasard. Il s'agit de la « rue Neuve des Capucins », autrement dit la nouvelle rue qui permet d'accéder à leur couvent. Le couvent disparaîtra, pas l'adjectif de neuve.
Le roi fait paver ces voies « dont la largeur sera portée à dix mètres ». Les autres rues ne font en effet que sept mètres de large, disposition confirmée par décret impérial de 1809.
Bidonville au 19e siècle
On construit haut de gamme dans la rue Neuve. Ce n’est pas le cas dans la rue des Capucins qui connaît une construction de masse. On construit à tout va de part et d’autre de la rue, sans respect des règles architecturales, un empilement plus ou moins solide de cubes hétéroclites. Les logements sont souvent insalubres et s’écroulent régulièrement (archives municipales).
En cette fin de 18e le quartier prend l’aspect d’un bidonville que les élus tentent de résorber à grands coups d’arrêtés municipaux pour en réglementer les matériaux de construction. Il faut attendre la fin du 19e et les travaux sur l’actuelle rue Gourdon (1866) pour que la rue Victor Hugo connaisse également d’importants travaux de mise au norme des alignements.
Quant au nom même d’Hugo, les archives municipales n’ont pas conservé sa date de baptême (Hugo est mort en 1885). Tout au plus peut-on dire que la Révolution ayant débaptisé les noms à consonance religieuse, le chemin a pour un temps porté le nom de Bourchevreau.
Brèves de trottoirs
Pavage
Le pavage de la rue remonte à un arrêté municipal de 1866. Il fut terminé en 1875. La loi obligeait les riverains à paver leur propre bout de trottoir devant chez eux. Inutile de dire que certains y ont mis de la mauvaise volonté. Les archives municipales comptent de nombreuses sommations, y compris dans les années 1870-1880.
Drôle de naissance
C’est dans cette rue qu’est né un certain Bernard Giraud, plus connu sous le nom de Patrick Raynal, dit Berlodiot. C’est un humoriste bien connu dans la région, dont le texte célèbre, le cornemuseux d’marmignol, est dans toutes les mémoires (et sur internet).
Coupe-gorge
Il existait dans la rue Victor Hugo l’entrée arrière d’une maison close dont la façade principale donnait rue de la République, à l’emplacement de l’actuelle Société Générale. Il y avait là une cour avec un bâtiment au fond. La sortie discrète avait lieu rue Victor Hugo. Les plus anciens de la rue se souviennent encore des galopades des clients qui s’échappaient par l’arrière alors que la police investissait la devanture. Cela a fait partie de la mauvaise réputation de ce coupe-gorge que fut un temps la rue Victor Hugo.
Images : Archives municipales Vierzon.
Le vendredi 4 mars 1977, il y a tout juste 45 ans, les autorités locales inauguraient la nouvelle bibliothèque de Vierzon. Le maire Léo Mérigot saluait alors la réalisation depuis « si longtemps espérée » d'un équipement « enfin digne de notre ville ».
Tout le monde connaît l'humanisme de Léo Mérigot et son amour des livres. Les témoignages sont nombreux des personnes qui ont pu, passant par son domicile de la rue de l'Étape, admirer la bibliothèque dans laquelle il aimait s'enfermer après sa journée à l'hôpital. Passionné d'histoire, de sciences, il affiche un faible pour la littérature du 16e siècle, pour Rabelais en particulier, mais aussi pour les antiques. Libre penseur comme son père (instituteur), il s'intéresse également à l'ésotérisme, entretient des relations avec des groupes d'intellectuels au gré de ses voyages. Il est également un parfait connaisseur de l'astrologie et un des meilleurs analystes de Nostradamus.
Création 1905
La bibliothèque de Vierzon date en fait de la municipalité d'Émile Péraudin, maire de Vierzon Ville de 1900 à 1925. Il fonde la première bibliothèque en 1905 dans les locaux de la mairie.
La ville alors était en pleine expansion économique et les jeunes ouvriers vierzonnais trouvaient facilement du travail dans les usines locales. L'idée de Péraudin consistait en la formation des futurs ouvriers et contremaîtres. Ils devaient être suffisamment armés et formés pour entrer dans n'importe quelle usine locale. Péraudin fait alors appel à des personnalités locales pour constituer un fonds digne de ce nom. Perrin, directeur de l'École Nationale Professionnelle Henri Brisson lui établit des listes d'ouvrages dont l'acquisition serait judicieuse.
Dans cette optique également, Marc Larchevêque est consulté. Il est patron d'une usine de porcelaines et lieutenant, chef de la compagnie des sapeurs pompiers de Vierzon Ville. Larchevêque établit des listes thématiques d'ouvrages qu'il va acquérir sur ses propres deniers pour la bibliothèque : métallurgie, porcelaine, arts du feu, mécanique, dessin industriel... sans oublier la couture, l'économie domestique et les bonnes manières...
Péraudin laisse la gestion du fonds à sa femme et à son gendre, Edmond Laurençon. Ce dernier passionné d'histoire locale, écrira un court ouvrage en 1913 : « Histoire de Vierzon depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours ».
Fermeture de 1939 à 1947
La bibliothèque a la bougeotte. Lors du dernier mandat de Péraudin, le travail de bibliothécaire devient une activité annexe des employés du service état-civil qui gèrent également les prêts de livres. Les achats ne suivent plus, le nombre d'inscrits chute pour atteindre 32 en 1937.
La fusion des Quatre Vierzon en 1937 fut un nouveau coup dur pour la bibliothèque. Le rapatriement dans la mairie de Vierzon Ville des services de autres mairies de Villages, Bourgneuf et Forges a entraîné d'importants travaux de restructuration. Les livres furent alors entassés dans le grenier de l'hôtel de ville... pour être redescendus quelque temps plus tard.
Pas pour longtemps malheureusement. Le service de la bibliothèque a été suspendu à cause de la guerre. Il a fallu libérer des locaux pour l'Occupant. La bibliothèque a donc été mise en caisses et transportée en deux lieux différents en ville : la plus grande partie dans un local prêté par la Société Française, quelques caisses entreposées dans un garage municipal du Tunnel-Château.
Mais entre-temps les Allemands s'étaient servi. Ils avaient réquisitionné des ouvrages en français – beaucoup d'ouvrages scientifiques – pour le « soldatenheim », foyer du soldat, dans l'hôtel de la Rotonde.
À la Libération, le passionné de livres qu'était Léo Mérigot ne pouvait pas ne pas s'occuper de faire rapatrier les livre dispersés. Les caisses entreposées à la Société Française et celles du garage municipal ont réintégré la mairie. Il a fallu également récupérer le fonds restant de la Rotonde. La surprise fut qu'il y avait également des livres de langue allemande que l'Occupant n'avait pas emportés. Ils furent mis à disposition de Monsieur Weiss, professeur d'allemand à l'ENP., pour ses élèves. Il en reste quelques uns au fond des étagères du lycée...
Mais Mérigot n'a pas le temps de trouver un nouveau local pour la bibliothèque. C'est le municipal Caron qui va s'occuper de placer la bibliothèque municipale au premier étage de la mairie, en face de la salle des mariages. À sa réouverture en 1947 tout est à refaire. Il ne reste que 3700 ouvrages dignes de ce nom. Beaucoup ont disparu, d'autres sont obsolètes du fait de leur ancienneté.
Un effort est entrepris pour combler les dix ans de fermeture et, surtout, la bibliothèque sera dorénavant un service à part entière, complété par un règlement intérieur et des statuts votés en conseil municipal. Surtout il connaît un personnel dédié, Monsieur Lapha, qui occupe le premier poste de bibliothécaire à plein temps.
De 1959 à 1977, la longue attente
En 1959, la municipalité Mérigot hérite d'une bibliothèque qui dépasse les 1000 inscrits et les 7000 livres.
La priorité allait au logement social. Le projet engagé par Caron de détruire et reconstruire le quartier insalubre du Tunnel-Château sera achevé au début des années 1960. À quartier neuf, nouveaux équipements : la municipalité lance deux projets majeurs, un musée et une bibliothèque qui doivent voir le jour dans le quartier.
En attendant leur réalisation, Mérigot dresse le portrait robot de la future bibliothèque. « Elle doit être conçue comme un instrument de progrès idéologique et une arme de propagande » Pour ce faire, outre « les saines lectures distractives, il faut y trouver, dans les diverses disciplines, les traités suffisamment complets pour fournir toute documentation courante, sans oublier toute la littérature socialiste et marxiste... » Autres temps, autres mœurs...
Mais la bibliothèque ne vient pas. Les subventions sont inexistantes. Le ministère des affaires culturelles est pourtant créé en 1959 avec André Malraux à sa tête. Mais la composante bibliothèque n'existe même pas au sein du ministère.
La donne change dans les années 1960. Un réseau des bibliothèques s'est créé qui se dote d'une charte commune.
À Vierzon, alors que les premiers appartements du Tunnel-Château sont livrés, la municipalité entame une nouvelle réflexion : il existe toujours en ville un problème lié à la fusion des Quatre Vierzon, celui d'un centre ville mal défini. Le comblement du canal de Berry doit apporter une solution par l'implantation d'une cité administrative sur les terres nouvellement conquises sur l'eau. Le canal comblé en 1968, de nouvelles infrastructures doivent s'y développer, dont la bibliothèque qui change de lieu d'implantation. Les Vierzonnais seront attirés dans ce nouveau centre par les administrations qui s'y trouvent, puis, dans un deuxième temps par l'apport d'un commerce phare type grande surface dans le projet urbanistique du Forum République.
Après le central téléphonique en 1970, après le centre des impôts en 1975 et avant la poste et l'EDF, les travaux de la bibliothèque arrivent enfin, dus à l'architecte Serge Lana. Ils dureront trois ans.
Léo Mérigot pose la première pierre en mai 1974. Roger Faletto, maire adjoint à la culture est à ses côtés.
Un bibliothécaire est engagé, Dominique Mérigot. C'est lui qui proposera le nom de Paul Éluard comme dédicataire du bâtiment. La bibliothèque municipale est inaugurée le vendredi 4 mars 1977 en présence de l'écrivain Tahar Ben Jelloun et du poète Jean Marcenac, ami de Paul Éluard.
45 ans plus tard la bibliothèque fait sa mue. De nouveaux supports sont apparus, disponibles au prêt, cd, dvd, livres-audios, et aujourd'hui jeux vidéos et jeux de société. Il aura fallu deux ans de travaux pour pousser les murs d'un nouvel écrin qui accueille près de 90 000 documents, tous supports confondus.
Inauguration médiathèque : ce vendredi 4 mars 2022, 17h30
Semaine festive à la médiathèque : du 5 au 12 mars 2022
La médiathèque est ouverte à compter du samedi 5 mars 2022, du mardi au samedi.
Images : Archives municipales Vierzon
Difficile, dans les archives, de retrouver l'origine de la propriété de Fay (Fez dans son orthographe d'origine). Sur cette terre, le cartulaire de Vierzon (chartes de l'abbaye) ne donne aucun renseignement.
Cela semble logique, la terre de Fay, ne dépend pas de l'abbaye Saint Pierre, mais bien de la grosse tour de Vierzon, celle des seigneurs castraux.
À l'origine la propriété était plus vaste qu'aujourd'hui, englobant une grande partie occidentale de Vierzon, de la route de Tours à la route de Paris ; du Coq gaulois, à Bois Marteau en passant par la Bercetterie, Charnay et le Verdin.
Dans ces « Mémoires sur Vierzon » (1748), Béchereau avocat du roi, ne donne que deux renseignements sur la propriété. On y apprend que la source de Fay soulage le « feu sauvage » (herpès) et que l'argile qu'en en tire est utile aux faïenciers. Ses successeurs, de Toulgoët à de Kersers n'en diront pas d'avantage par manque cruel de textes.
Les de Francières
Les archives notariales donnent la propriété « du fief et hostel de Fez » à une certaine dame Margaron qui la vend au chantre de Mehun sur Yèvre en 1380.
On la retrouve entre les mains de la famille Pathofleau après 1448. C'est alors par le mariage des filles que la propriété se transmet de générations en générations.
La famille de Francières possède la seigneurie de Fay depuis au moins 1748. Ils ne sont pas des inconnus en ville. Ils apparaissent comme gouverneur de Vierzon, représentants du roi en 1500. Le plus connu des de Francières fut Robert qui prit part aux guerres de religion, dans le camp de la Ligue. Issus d'une famille de riches marchands, les de Francières possédaient également un des plus beaux hôtels particuliers du Vieux Vierzon, dans l'actuelle rue de l'étape, une sorte de palais d'hiver.
De Mac Nab à Célestin Gérard
Par un nouveau mariage, la propriété de Fay avec son étang passe dans les mains de la famille Mac Nab, en 1810. Les Mac Nab sont d'origine écossaise et l'aïeul qui fonde la branche française est un soldat (mercenaire) garde du corps du roi Louis XV.
Édouard Mac Nab sera conseiller général, deux ans maire de Vierzon Villages pendant la Seconde République, de 1850 à 1852.
Avant cela, Édouard a vu sa propriété amputée d'une grande partie sur le sud-Est. Il subit les expropriations liées à l'arrivée du chemin de fer, les lignes Orléans – Vierzon, Vierzon – Tours, et enfin la gare de triage.
Son fils – qui donnera son nom au théâtre vierzonnais – est le chansonnier Maurice Mac Nab qui fera les beaux jours du cabaret parisien « le chat noir » dans es années 1880. Il y créera « le grand métinge du métropolitain », chanson écrite pour les grévistes de la Société Française, en 1886.
Enfin, dans les années 1870, les Mac Nab vendent la propriété à Célestin Gérard, précurseur justement de la Société Française. Il avait fondé les ateliers de construction de machines agricoles face à la gare en 1848, revendus à Arbel en 1877 pour devenir la SFV...
Le château de Fay est très laid
Maurice Mac-Nab n'est pas le seul à aimer les rimes. Un jeune vierzonnais s'y essaye également, Salvinien, qui brocarde la château familial des Mac-Nab :
« Le château de Fay se dresse près d’une forêt épaisse où le gibier se presse, fait la nique au châtelain. Mais dès que l’on s’en approche, le regard, déçu, s’accroche à plus d’un détail qui cloche, autour du château de Fay, plus beau de loin que de près.
Le long mur qui s’écroule, vide hélas ! de toute foule, un petit jardin déroule son dessin sans mouvement ; dans les sentiers, l’herbe pousse comme sur les toits la mousse, une Solognote rousse en est le seul ornement, car ne sachant plus qu’y faire, le malin propriétaire a fui la saison dernière son pauvre château de Fay, plus beau de loin que de près.
Au milieu d’une clairière veuve même de bruyère, s’ouvrent maintes fondrières qu’il faut traverser ; d’abord on se trouve alors en vue d’une superbe avenue depuis si longtemps venue que plus d’un arbre en est mort ; tout au bout, un conifère un peu chauve et solitaire mort à ce château de Fay, plus beau loin que de près.
Or, inconséquence extrême, si ce châtelain que j’aime m’offrait le château lui-même que je vous peins au pastel, sans doute banale et sotte, je prendrais la Sologne avec le pin qui sanglote et les trous et le castel, dussé-je, pour le prix de vente, lui chanter sans variante merci au château de Fay plus beau de loin que de près. »
Cette farce a reçu une réponse de la part de la châtelaine, qui n’est autre que la mère de Maurice Mac Nab, Béatrix :
« Je ne fus jamais bien austère, vous le savez mon jeune ami, votre muse parfois légère ne me cause donc seul souci et sans rancune je veux rire de la très plaisante satire où vous chapez mon pauvre Fay, plus beau de loin que de près.
Quoique votre verve critique ait un peu chargé le tableau, je reconnais pour véridique certains traits de votre pinceau. Pourtant, admirez ma faiblesse, naïvement je me confesse d’aimer ce vieux château de Fay qui n’est beau ni de loin ni de près. »
Images : Archives municipales Vierzon
À circonstances exceptionnelles, destin exceptionnel. Destin tragique que celui de Raymond Toupet. La seconde guerre mondiale l'a conduit au sacrifice, fusillé dans sa barque le 6 février 1942, à l'âge de 40 ans, il y a tout juste 80 ans.
C'est l'histoire d'un passeur, comme Vierzon et sa région en ont connu beaucoup, à partir de juillet 1940. Certains sont restés anonymes. Certains ont été interpellés, condamnés, incarcérées et libérés. Les récidivistes auront été sévèrement châtiés, envoyés en déportation. Beaucoup y sont morts. D'autres seront fusillés sur place, comme Raymond Toupet.
Il est né en 1902 et exerçait la profession d'ouvrier ajusteur lorsque la guerre a été déclarée. La convention d'armistice instaurait une Ligne de Démarcation sur le Cher, qui fut mise en place dans les premiers jours de juillet 1940.
Habitant Thénioux, il voit se monter la guérite de la « Zoll » non loin de chez lui. Grâce à une bonne connaissance des lieux et de la rivière du Cher, c'est tout naturellement, avec son frère Marcellin qu'il organise les passages des premiers clandestins vers la zone libre. Au début ce sont essentiellement des éfugiés ou des soldats prisonniers évadés que les frères prennent en charge dans la barque de Raymond.
Les Allemands l'arrêtent une première fois en 1941, condamné à 8 jours de prison au Bordiot. Une fois libéré, il reprend de plus belle son activité, faisant passer de nombreux clandestins, aviateurs, condamnés recherchés par les autorités allemandes ou françaises...
La filière des frères Toupet est connue jusque dans les stalags allemands. Les candidats au passage en Angleterre via l'Espagne avaient également ce même renseignement.
Parallèlement, les candidats au passage renseignaient Raymond des nombreuses activités des troupes d'occupation en zone nord, renseignements que Raymond collectait et transmettait au deuxième bureau de l'armée d'armistice, à Châteauroux, dont beaucoup d'officiers travaillaient en fait pour Londres.
Repéré au bord du Cher à Thénioux, Raymond est pris pur cible par les Allemands le 6 juin 1941. Les deux frères s'enfuient en zone libre. Recherchés par les autorités, ils sont convoqués au tribunal de la Feldgendamerie le 1er juillet 1941 (voir image jointe). Le 3 ils sont condamnés à mort par contumace.
Raymond poursuit tout de même son activité de passeur. Il s'installe en zone libre, à Vierzon Bourgneuf. Des rabatteurs des environs lui envoient des candidats au passage. Il les passe la nuit, dans sa barque, entre Abricot et Genette. Et le 27 novembre 1941 il essuie un nouveau tir de douanier. Il est blessé à la jambe et sera soigné à Châteauroux.
Alors que Marcellin est mis en résidence surveillée à Lignières par la police de Vichy, Raymond Toupet poursuit seul son activité de passeur. Son dernier passage a lieu le 6 février 1942.
À cette époque de l'année où le Cher est en crue, cinq clandestins ont pris pied à bord de la barque lorsqu'elle est prise pour cible. Raymond s'écroule pendant que les clandestins se mettent à plat ventre. Un d'eux se sauvera en passant par dessus bord. Il sera récupéré par les Allemands le lendemain ; il s'était accroché aux branches d'un arbre au milieu du Cher.
Le lendemain également, on retrouve la barque où gît le corps de Raymond à la Loeuf sur la rive sud ; les clandestins ont disparu.
Ses obsèques seront célébrées à Bourgneuf le 10 février en présence des officiers de l'armée d'armistice de Châteauroux.
En 1945, un procès va avoir lieu au tribunal de Bourges, dans le cadre des procès de l'épuration. En effet, les langues se sont déliées et on accuse A..., un des rabatteurs de la filière Toupet de l'avoir dénoncé. Ces archives judiciaires ont été récemment déclassifiées et sont donc consultables par tous.
À la lecture des différents actes, on en apprend également beaucoup sur l'organisation des passages. En février 1942, Raymond Toupet travaillait avec deux personnes : A... et B... . A... est le rabatteur de Raymond, celui qui prend les contacts avec les clandestins et qui les dirige vers la barque de Raymond. B... quant à lui est le financier. Les passages n'étaient pas toujours gratuits. Les sommes demandées aux clandestins pouvaient aller de 100 francs à 1000 francs (salaire moyen d'un petit employé de mairie en 1940 = 1000F/mois).
En effet, Toupet fournissait si besoin est, des faux papiers, des vêtements, de la nourriture pour quelques jours. Et pour les plus modestes qui ne pouvaient pas payer, il lui arrivait de fournir un pécule...
Que s'est-il passé le 6 février 1942 ?
Selon le procès, les faits se sont déroulés ainsi : A... et B... avaient donné rendez-vous à la nuit tombante à un clandestin dans le café du tacot (avenue Jean Jaurès). Alors qu'ils étaient à consommer, la Gestapo a encerclé le café. Les deux portes, avant et arrière sont surveillées. Alors que la Gestapo, envahit le café par la porte principale, A... s'enfuit par la porte arrière et n'est pas inquiété par les Allemands. B... et le clandestin sont arrêtés et dirigés vers le 12 boulevard de la Liberté... Au même moment, les douaniers étaient au moulin de l'Abricot et tiraient sur Toupet. Tous les témoins qui étaient présents dans le café, déclarent que A... a sans douté dénoncé la filière. Que pas un Allemand n'a essayé de l'intercepter à la sortie du café et qu'ils n'ont pas sorti leur arme de leur étui. D'autres sont plus affirmatifs : entre rabatteurs on savait que A... n'était pas fiable.
Le procès a duré peu de temps. A... n'était pas que rabatteur, il était également passeur. Il a fourni des témoignages de personnes qui ont confirmé que leur passage s'était très bien passé et qui le remerciaient.
Au vu de ces témoignages, au vu du manque de preuve, A... a été acquitté des faits reprochés.
Il ne restait plus alors que l'intime conviction des protagonistes...
Images :Archives municipales Vierzon Archives départementales du Cher
Dans une chronique précédente (voir l'archive du vendredi 6 novembre 2020 sur Facebook), nous avons déjà évoqué la personnalité du premier maire de Vierzon, François Rouseau de Belle Île, et sa confrontation avec le lieutenant général du bailliage de l'époque.
Cet épisode-ci participe à la querelle que les deux hommes se sont livré durant des années...
Nous sommes le 20 avril 1695. François Rousseau, maire perpétuel omnipotent en place depuis deux ans, procède à l’arrestation d’un quidam qui lui semble louche. La description de ce cas nous est parvenue, une fois encore, grâce aux registres du tribunal de bailliage de Vierzon conservés aux archives départementales du Cher.
François Rousseau explique les circonstances de cette arrestation : « Nous promenant près le puy Saint Jean de Vierzon, avons rencontré un homme vêtu d’un habit d’ermite auquel avons demandé qui il était, où il allait, d’où il venait. Il nous a répondu qu’il était de Tulle et frère chapeau des Récollets. A quoi nous lui avons demandé s’il avait obédience ou passeport. Lequel nous a répondu n’avoir ni l’un ni l’autre, ce qui nous a donné lieu de lui dire qu’il y avait quelque mystère caché sous son habit et qu’apparemment n’était point frère chapeau des récollets mais quelque travesti ou espion. Aussi avant que de le laisser aller plus avant, nous étions obligés pour l’intérêt du roi et le devoir de notre charge de nous instruire du motif de son voyage.
Vêtu de séculier
Le sommant de nous le dire, il nous a dit que les pères du couvent où il demeurait près de Tulle ayant été chassés de leur couvent, l’aurait chargé, ayant des connaissances à Paris, d’aller solliciter leur rétablissement. Partis à deux, son compagnon l’aurait quitté à Aubusson.
Comme cette réponse n’était pas sincère par les différents interrogatoires que nous lui avons faits et au contraire il s’était coupé en plusieurs fois, tantôt nous disant qu’il avait quitté son couvent pour mécontentement, tantôt pour aller se faire frère de la charité à Paris.
Nous avons jugé nécessaire de prendre des connaissances plus particulières de sa personne et à cet effet nous l’avons fait entrer chez Huguenin, demeurant près le puy Saint Jean. Là nous lui avons ordonné de se défaire de sa robe d’ermite. Nous l’avons trouvé vêtu d’un juste au corps et vêtu de séculier portant chapeau lequel nous a davantage confirmé que cet homme était suspect.
Nous lui avons ordonné d’exhiber tout ce qu’il avait dans les poches : quelques livres de dévotion, un chapelet et une bourse contenant deux louis d’or. Attendu que nous n’avons pu tirer de lui aucun éclaircissement de son pays, de sa profession et du sujet de son voyage ; ses variations et le double habit dont il est vêtu donne sujet de questionnement. Nous l’avons, pour l’intérêt de l’Etat, fait conduire dans une tour de cette ville servant de prison pour demain le faire conduire sous bonne garde à Monsieur l’Intendant. »
Le travesti enlevé
Oui mais voilà, c’était sans compter sur le lieutenant du bailliage, véritable concurrent aigri du maire François Rousseau.
Au courant de l’arrestation de ce personnage ambiguë, le lieutenant général du bailliage entre en scène.
Et Rousseau de poursuivre : « Et ledit jour 21 avril 1695 par devant nous juge est comparu le sieur Huguenin chargé de fournir audit travesti le pain des prisonniers lequel nous a dit que lui portant ledit pain et étant sur le dessus de la porte des ponts qui conduit à la tour, seraient montés noble Adrian de Lanjon, lieutenant général, Gabriel Thomas, procureur du roi et Martin Richer greffier, et Mathurin Guérinet huissier lesquels lui auraient dit de lui présenter ledit travesti. A quoi il leur aurait dit que le maire l’avait fait prisonnier comme suspecté d’être quelque espion. Il ne pouvait donc pas le leur présenter sans auparavant nous demander avis. Sur quoi le sieur Lanjon se serait jeté sur lui et lui aurait tiré des mains la clé de la porte de la tour et ensuite aurait été à ladite tour, l’aurait ouverte et enlevé le travesti. Huguenin nous requérant pour sa décharge lui donner acte dudit enlèvement pour servir à valoir ce que doit. »
Qu’a donc fait le lieutenant général du travesti ? Voulait-il l’interroger lui-même ? Ou l’emmener lui-même à Bourges auprès de l’Intendant pour se faire bien voir dans ce conflit qui oppose les deux hommes de pouvoir à Vierzon ? Toutes les hypothèses sont plausibles. Cela ne lui a pourtant pas coûté sa place. Adrian de Lanjon, lieutenant général à Vierzon depuis 1650, a conservé sa place jusqu’en 1702, remplacé par René Rossignol.
On comprend mieux qu’il ait été blessé qu’un freluquet en culottes courtes piétine ses plates-bandes en 1693. Cela faisait quarante-trois ans qu’il régnait en maître à Vierzon...
Et pourtant, avec le changement de personnel judiciaire, les querelles se poursuivront entre bailli et maire. Bientôt ce sera au tour de François Rousseau d'être accusé d'avoir chanté trop fort... Affaire à suivre, donc...
1961 : Un flot de petits vierzonnais, filles et garçons, découvrent pour la première fois les joies des sports d'hiver. La joyeuse ribambelle débaroule en désordre sur les pentes de Saint Léger les Mélèzes. Les combis ont aujourd'hui remplacé les bons vieux anoraks-cagoules mais les cris résonnent de même au pied des tire-fesses.
Programme électoral 1959
Lors de la campagne électorale pour les municipales de 1959, la liste du Parti Communiste menée par Léo Mérigot présentait son programme en trois points, trois points qui seront l'épine dorsale des mandats qui suivront.
Le premier axe était le logement social. En 1959, Vierzon comporte encore beaucoup de mal logés dont certains le sont depuis 1944 et le bombardement du 1er juillet.
Le deuxième axe est celui des personnes âgées, les « Anciens », comme aimait à les appeler le 1er adjoint Fernand Micouraud. Le « colis des vieux » date de cette époque ; la construction de la maison de retraite Ambroise Croizat également...
Quant au troisième axe, ce sera celui des jeunes. Créations de nouveaux groupes scolaires, de nouveaux terrains de sport, sans oublier la crèche, sortie de terre en 1973 sur le jeune quartier du Clos du Roy.
Sports d'hiver
La jeunesse de Vierzon pourra également profiter des joies de la poudreuse lors de classes de neige organisées pour les écoliers. Chaque année en janvier les élèves de CM1 pourront apprendre le chasse neige sur les pentes des Alpes.
1961, Une... Première : quelques dizaines d'écoliers découvrent le ski à Sappey en Chartreuse, près de Grenoble. Les enfants en reviennent enchantés ; la municipalité également. Elle a gagné son pari de devenir la première commune du département à organiser ces classes de neige.
Vierzon connaissait les colonies de vacances aux Trois Brioux depuis les années 1930, dorénavant l'hiver n'est plus un obstacle « au grand air ».
La politique tarifaire permet à de nombreux jeunes de tous milieux de partir. Dès 1961 l'hôtel de Sappey se révèle trop petit. Il faut penser plus grand. C'est la commune de Pont du Fossé qui est choisie, proche de Gap. Elle a l'avantage de posséder deux vastes hôtels dont les seuls noms vont évoquer bien des souvenirs aux quadras et quinquas vierzonnais, voire aux jeunes retraités : l'hôtel « DRAC ET MONTAGNE » et le chalet « LES DIAMANTS ».
Le Brudou
Vierzon recherche dès 1964 son propre terrain où installer cette colonie d'hiver. Le terrain acheté les travaux peuvent commencer et « LE BRUDOU » peut sortir de terre et devenir opérationnel en 1969. Là encore ce nom de BRUDOU résonne à nos oreilles comme notre madeleine de Proust. Certes il y avait classe en demi-journée. Mais y aller en pantoufles, c'est quand-même quelque chose !
Aujourd'hui le brudou est toujours debout, même s'il n'appartient plus à la ville de Vierzon. Un temps propriété des PEP, il est devenu centre de colonie de vacances, été-hiver, géré par un privé.
Qu'à cela ne tienne, les nouvelles générations de vierzonnais qui ont eu ou qui auront la chance de partir à Pont du Fossé reviendront bourrés des mêmes souvenirs que leurs aînés des décennies passées.
Pont-du-fossé, février 1979
Classe de CM1, école du Bourgneuf.
Quelques jours avant « le grand départ », réunion des parents à l'école. Vérification du trousseau type ; rappel de la nécessité de coudre nos noms sur nos vêtements ; dernières consignes données aux parents. Et enfin c'est le grand jour, le grand soir plutôt.
Ramassage des élèves partant de l'école par car scolaire et faisant le tour des différents quartiers.
Arrivée à la gare. Montée dans le train affrété tout spécialement.
Voyage de nuit. Vous êtes sensé dormir pour arriver frais et dispos (dormir???)...
Descente du train, arrivée au Brudou et prise de contact avec les locaux dont l'immense cheminée centrale). Choix de la chambre. Essayage des chaussures et des skis.
Classe le matin, ski l'après-midi. Et entre les deux, la cantine et ses tables de 6 en formica.
Séance d'écriture aux parents et familles (ici tout va bien). Et le passage obligé au magasin de souvenirs (potier) pour dépenser l'argent de poche et offrir un beau souvenir aux parents (moi ce sera un pot à crayons).
Hop, en piste. Apprentissage du tire-fesses, du chasse-neige et du virage, à gauche ou à droite. Et la photo officielle qui rendra fier les parents.
Une journée spéciale en petit groupe pour le ski de fond. Et une autre à la patinoire de Gap. Sans oublier les séances de luge sur sur des sacs plastique.
La cabane dans le parc du Brudou, avec les copains. Et le dimanche soir, séance de cinéma pour toutes les classes rassemblées dans le hall. De même que la chasse au trésor.
Et puis, au bout de 21 jours qui peuvent paraître trois semaines, le passage devant un jury. Un par un pour la première étoile.
Enfin le retour à Vierzon. Retrouvailles sur le quai de la gare, récupération de la valise et retour à la maison.
Et c'est là seulement que les choses sérieuses commencent : « Alors, raconte !... »
Février 1979, hier…
Images : Archives municipales Vierzon
Ici commence l'enquête. Qu'est ce donc que cet éguilan que l'on donne aux enfants ? Dans les musées des arts populaires et folkloriques ? Rien. Aux archives du Cher ? Rien non plus... Il faut faire appel aux plus fins limiers, passionnés d'histoire du Berry, voire de berrychonneries, voire de vieils parlures d'autrefois, voire de tout cela à la fois.
En attendant, c'est un poète et académicien... breton, (eh oui) qui va nous en apprendre un peu plus sur notre tradition. Découvrons un extrait de « Fêtes et coutumes populaires » de Charles Le Goffic en 1911 :
La spécialité culinaire est donc bien spécifique pour Vierzon. Reste à en connaître les détails.
Enfin, quelques jours plus tard, la Dépêche se fait à nouveau l'écho de la tradition. L'article du 31 décembre a fait réagir un vieux boulanger retraité qui a pris la plume pour expliquer ce qui se faisait « de son temps », c'est-à-dire au siècle précédent. Il explique qu'il s'en vendait « plus de 2000 douzaines » rien que le jour de l'an. Quant à sa forme, notre anonyme vieux boulanger a une explication bien à lui, explication que l'on se transmettait de bouche à oreille de pâtissier depuis des générations.
Aujourd'hui la tradition est morte. Quand était-elle apparu ? Notre vieil historien Béchereau, en 1750 n'en a pas parlé. Peut-être que l'aiguilan n'existait pas encore. Ou plutôt qu'il n'a pas estimé nécessaire d'en parler. Aujourd'hui cela fait une centaine d'années que la tradition est morte. Peut-être une boulanger s'en emparera pour faire revivre notre « lichounerie » purement vierzonnaise...